Blandy Mathieu : Je manipule mes angoisses

Artiste-peintre dans l’âme, Blandy Mathieu s’est créé son propre univers depuis cinquante ans. Sa maison à Saint-Mard, commune de Virton, est à son image. Une véritable galerie colorée avec son atelier d’artiste.

Chaque tableau décèle des détails chaleureux, témoins fictifs d’un art aux sources de l’antiquité.

Au village de Saint-Mard, tout le monde connaît bien la « Blandy », une petite dame à lunettes, très attachante, qui tient la galerie « Mistral ». Mais tout n’a pas toujours été si évident pour Mme Mathieu, de son vrai prénom Blondine. Il a fallu du temps pour s’imposer et pour tomber définitivement dans l’art tout court. « J’ai tenu un café mais ce n’était pas mon truc. Plus tard, j’ai vendu des tissus mais c’était devenu difficile. Mais pour pouvoir être libre de peindre, il me fallait bien un peu d’argent. J’ai eu la chance d’avoir un mari qui aimait peindre aussi. Il était postier et il écrivait même à ses heures. » Blandy a toujours été imprégnée de couleurs, de belles peintures évocatrices. « Petite, j’étais pensionnaire à l’école privée Sainte-Chrétienne de Longuyon. Les sœurs m’avaient donné le goût de la musique et du dessin. J’ai fait mes humanités artistiques en quelque sorte. » Les religieuses avaient fini par franciser son prénom en Blandine, d’où le diminutif trouvé par la suite en Blandy. « En même temps, ça me plaisait mieux car ça fait plus nom d’artiste ! » (rires…).

Blandy exhibe une toile chiffonnée, datée de 1953. « Jetais plutôt bête de l’avoir jetée. Maman l’avait récupérée à la poubelle. La toile représente Cupidon ! » Plus tard, s’ouvre la première exposition, après avoir suivi des cours complets de dessin et de peinture à Bouillon et à Arlon. En 1959, dans sa commune de naissance à Halanzy. Eprise du mélange des cultures, Blandy se transpose vers des contrées lointaines, remonte le temps pour finalement pénétrer l’art opulent byzantin. Elle en a gardé le goût des patines et des glacis. Actuellement, elle réalise des panneaux décoratifs somptueux. « C’est toujours un peu fantastique et je m’inspire nombreuses lectures. »

A la source des énergies

Blandy puise ses énergies un peu partout. « Tout est intérieur. Mais il m’est arrivé de ressentir les choses en pleine nature, par exemple sur les bords de l’Othain en France. Je finis par manipuler mes angoisses, mes ressentiments. » D’où ces citations personnelles que l’artiste gaumais rajoute parfois à ses tableaux devenus très intimes : « Vois mes tempêtes, mes orages, mon parfois désir de mourir… Quand le rêve est beau, le jour sourit. » Trop accaparée par son œuvre picturale, Blandy délaisse l’écriture mais la consigne sur des fiches. Attirée par la France, l’artiste de Saint-Mard s’est imposée à Antibes, à Grasse, avant d’exposer à Longwy et Longlaville. « J’ai fréquenté des personnalités frontalières de la peinture. » Sa plus grande fierté, Raphaël, son fils. Il est devenu dessinateur de presse et signe parfois dans nos colonnes sous le pseudo Rafagé. Le plus grand bonheur de Blandy : Ma maison et le jardin de ma maison. Son voeu : organiser un événementiel régional, à la hauteur de son talent et de son demi-siècle de création.

Jean-Pierre Ricard (Le Républicain Lorrain)